L’entreprise, acteur majeur d’un processus de recrutement par la formation

« Apprentissage Métier en Milieu de Travail, Apprentissage Intégré au Travail, Activités de Formation En Situation de Travail, Formation Immersive, Formation en Emploi », autant de termes présentant une situation commune à beaucoup de pays au monde (Europe ou Amérique du Nord entre autres) : Les entreprises proposent depuis longtemps de former en interne leurs employés et leurs nouveaux recrutés afin de leur permettre de mettre à niveau leurs compétences en lien avec le poste occupé.

Si l’Europe et la France parle d’AFEST, ce n’est que depuis 2018 que la loi "Avenir professionnel" a reconnu l’AFEST (Action de Formation En Situation de Travail) comme modalité de formation à part entière, au même titre que la formation à distance (FOAD) ou la formation présentielle.

La loi "Avenir professionnel 2018" indique que : « L’action de formation est un parcours pédagogique qui permet d’atteindre un objectif professionnel. Elle peut être réalisée, entre autres modalités, en situation de travail ».

Trois objectifs sont à la base de cette reconnaissance de l’AFEST :
-Aider les entreprises à structurer des apprentissages plus ou moins organisés et formalisés
-Compléter et enrichir un dispositif de formation existant
-Renforcer une politique de certification de branche (l’équivalent de nos comités sectoriels de main d’oeuvre)

Mais qu’est-ce que l’AFEST ?

C’est un parcours de formation interne visant un objectif professionnel ; parcours bâti essentiellement par un référent qui est en quelque sorte l’architecte de l’action ;
Dans ce parcours, le travail est le matériel de formation. Cela suppose "de partir de la situation de travail pour remonter vers l’acquisition de savoirs théoriques et pratiques" (B. SCHWARTZ) ;
Ensuite, un ou plusieurs formateurs interviennent, ils peuvent mettre en œuvre plusieurs techniques et outils pédagogiques ;
Le cœur de l’AFEST est constitué de séquences de mises en situation suivies d’une analyse réflexive.

Mais alors dans quel cadre privilégier une action de formation en situation de travail ?

Souvent, ces actions visent prioritairement les personnes peu qualifiées mais peuvent être étendues, quel que soit le secteur d’activité, le métier ou la taille de l’entreprise. Elle vient compléter les dispositifs existants et réactiver la formation au sein des entreprises.


L’expérience française nous permet de tirer les enseignements suivants :

Avantages pour les entreprises
Ce type de formation a un impact positif pour l’entreprise à différents niveaux. 

1) Elle lui permet de former plus facilement ses salariés, et pour un coût réduit : ils sont mobilisés moins longtemps et acquièrent des savoir-faire sur le lieu et sur le temps de travail.
2) Elle accompagne également mieux ses collaborateurs dans le développement des compétences et le maintien de l'employabilité.
3) Cela se traduit par un cercle vertueux : une marque employeur plus attractive, l’amélioration de la qualité des produits et services offerts, des gains de productivité et l’accroissement de la satisfaction des clients.
4) En s’appuyant sur un binôme composé d’un apprenant et d’un référent (idéalement dûment formé), ces programmes permettent aussi de valoriser les gestionnaires et de créer un climat de dialogue et de confiance entre encadrement et collaborateurs.

Lorsque le maintien et la préservation des savoir-faire sont clés pour l’entreprise, ces programmes offrent un joli terrain de transmission. Il existe beaucoup d’entreprises qui peinent aujourd’hui à trouver des formations externes idoines sur des savoir-faire rares et spécifiques. Ce type de formation permet de s’y substituer.

 

Avantages pour les salariés
1) Ces programmes consacrent la transmission des compétences. Elle apporte donc une reconnaissance à la fois aux experts qui détiennent un savoir spécifique, et aux salariés qui sont formés ainsi. Centrée sur l’opérationnel, ils ont immédiatement des effets sur l’efficacité et la qualité du travail de la personne formée. L’apprenant observe par lui-même sa montée en compétences et prend conscience des nouvelles évolutions possibles. 
2) Ils facilitent l’accès à la formation des personnes qui ne bénéficient pas ou très peu de formations. Son format, plus concret et opérationnel, sur le mode du learning by doing, avec l’observation par le manager, l’analyse de sa pratique et l’échange, répond mieux aux attentes d’un salarié qui aurait des réticences à aller en formation : il a le droit à l’erreur et il peut s’exprimer.

Et si les apprentissages étaient plus « efficaces » en situation de travail ?

À l’issue d’une formation en salle, combien de formateurs se posent la question : « les participants, une fois revenus sur leur poste de travail, vont-ils bien mettre en œuvre les compétences acquises ensemble ? »
La question du transfert est toujours complexe.

Dans ces cadres, les apprentissages sont observables en situation de travail. Il est donc simple de les évaluer si besoin.

Néanmoins, elle reste une modalité parmi d’autres et les premiers résultats des expérimentations en France montrent l’importance d’un diagnostic préalable et un travail préparatoire. 

Si deux étapes sont nécessaires à ce type de formation : la mise en situation et la réflexivité. Il ne faut pas omettre l’étape cruciale de la préparation, au cours de laquelle on définit le cadre et les conditions de mise en œuvre (accompagnement des acteurs mobilisés, élaboration des scénarios pédagogiques). L’appui de consultants en ingénierie de formation, peut le cas échéant, assurer la construction d’une démarche structurée et efficace.

Résultats probants

En 2020, les mesures de lutte contre le décrochage scolaire en France ont été renforcées pour la rentrée scolaire. L’obligation de formation qui vise à ce « qu’aucun jeune de moins de 18 ans ne se trouve sans solution et soit, ou scolarisé, ou en formation, ou en emploi » a été mise en place. Cela a permis entre autres à la France de baisser son nombre de décrocheurs scolaires, passant ainsi de 470 000 en 2016 à 77 000 en 2020. La formation en emploi a ainsi contribué à cette baisse spectaculaire.


En conclusion

La formation en emploi permet aux entreprises de faciliter l'intégration progressive d'un nouveau salarié à ses métiers et son environnement. Pour l'employeur, elle permet l'embauche à terme d'un salarié en toute confiance à l'issue de sa formation. 

C’est aujourd’hui un moyen à ne pas mésestimer et à mettre en œuvre pour faciliter l’accès à l’emploi et peut-être même contribuer à réduire la pénurie de main-d’œuvre.

- Christophe Charré -
Spécialiste en développement des compétences, Boomrank

Sources : 
https://www.formation-dialogue-social.com/7095/formation-en-situation-de-travail-quel-interet-de-mettre-en-place-une-afest
https://heqco.ca/wp-content/uploads/2020/03/HEQCO_WIL_Guide_FRN_ACC.pdf
https://www.cewilcanada.ca/