La venue des réseaux sociaux et des nouvelles technologies amenuise de plus en plus la frontière entre la vie privée et le milieu de travail. Les employés peuvent maintenant transmettre et échanger des informations diversifiées en lien avec leur travail et rejoindre facilement et rapidement une vaste audience. Que ce soit de l’information en lien avec des collègues, un projet, des clients, le climat de travail ou toute autre situation ou problématique, l’étanchéité est devenue mince avec ces diverses plateformes sociales; très actives avant, pendant et après les heures normales de travail.
Cette nouvelle réalité contraint les employeurs à être attentif et agir avec vigilance.
Obligations de l’employeur et harcèlement psychologique
L’obligation générale de l’employeur est d’assurer à ses salariés un milieu de travail exempt de harcèlement. Il doit donc prendre des moyens raisonnables pour prévenir la survenance de harcèlement psychologique et si, malgré les mesures mises de l’avant, une telle situation se produit, il a le devoir d’intervenir rapidement afin d’y mettre un terme.
Le principal outil que l’employeur doit mettre en place, afin de rencontrer son obligation en matière de prévention du harcèlement psychologique, est une politique qui énonce clairement les devoirs et responsabilités des dirigeants et des salariés.
Nouveauté à la Loi sur les normes du travail
La Loi sur les normes du travail prévoit l’exigence d’adopter et de rendre disponible aux salariés une politique de prévention du harcèlement psychologique mais également un mécanisme de traitement des plaintes. Les employeurs ont jusqu’au 1er janvier 2019 pour mettre en place cette politique et être conforme.
Une politique de prévention du harcèlement psychologique devrait comprendre les éléments suivants :
- La définition législative du harcèlement psychologique,
- Certains exemples de comportements pouvant être considéré du harcèlement,
- Faire mention d’une « tolérance zéro » à l’égard de ces comportements,
- Le processus interne qui permet la dénonciation d’une situation de harcèlement,
- Préciser les rôles des divers intervenants,
- Mécanisme d’enquête pour le traitement confidentiel des plaintes, en y faisant mention des personnes habilitées à diriger l’enquête.
Cyberharcèlement
Le harcèlement par Internet, aussi appelé « cyberintimidation », consiste en l’utilisation du réseau Internet pour harceler, menacer ou embarrasser quelqu’un de façon malicieuse. Aux États-Unis, on définit ce phénomène notamment par l’expression « cyberbullying ».
Puisque de nombreux travailleurs utilisent un ordinateur ou l’Internet dans le cadre du travail, le cyberharcèlement devient un enjeu pour lequel l’employeur doit de plus en plus se préoccuper.
Le cyberharcèlement peut se manifester sous diverses formes, notamment (mais non exclusivement) :
- Transmission de courriels menaçants.
- Diffusion de rumeurs.
- Transmission de commentaires diffamatoires au sujet de la victime dans des groupes de débat public.
- Transmission de messages négatifs directement à la victime.
- Utilisation en ligne de l’identité de la personne pour transmettre un message controversé, offensant ou injurieux qui suscitera chez de tierces personnes une réponse négative à la victime ou une réaction défavorable à son égard.
- Enregistrement de messages abusifs dans la rubrique des commentaires d’un site Web.
- Transmission à la victime de documents pornographiques ou autres matériels graphiques à caractère offensant.
- Création d’une page Web décrivant la victime de façon négative.
Les tribunaux conviennent que l’employeur doit donc intervenir lorsque des comportements à l’extérieur du lieu de travail ont des effets négatifs sur le milieu du travail.
Décisions intéressantes et exemples pertinents – Jurisprudence Cyberharcèlement
- Syndicat des travailleuses et travailleurs de Resto-Casino de Hull (F.E.E.S.P.-C.S.N.) (Section Hilton Lac Leamy) et Hilton Lac Leamy, D.T.E. 2004T-811 (T.A.)
- Raymond et Société canadienne des postes, 2013, QCCLP 5792
Ce qui ne constitue pas du harcèlement psychologique
Avant de déposer une plainte de harcèlement psychologique, le salarié devrait s’assurer qu’il ne s’agit pas plutôt de l’exercice légitime des droits de direction (des décisions de l’employeur relatives aux exigences de l’emploi, au rendement, à l’organisation du travail ou à la discipline), d’un conflit de travail, d’un conflit de personnalité, ou encore de rapports sociaux difficiles (manque de civilité ou inconduites passagères et ponctuelles).
Parmi les plaintes déposées ayant fait l’objet d’une décision de la Commission des relations du travail plusieurs ont été rejetées pour ces motifs précédemment nommés.
Un milieu de travail peut engendrer stress, conflits, désagréments et aussi insatisfaction, mais il n’en résulte pas obligatoirement une conduite vexatoire ou du harcèlement psychologique.
Avec les récents changements à la Loi sur les normes du travail, les employeurs pourraient saisir l’opportunité d’examiner leurs pratiques en vigueur et considérer la nécessité de sensibiliser, d’informer et de former les travailleurs ou encore de mettre à jour la politique en matière de prévention du harcèlement psychologique et les mécanismes de plaintes internes.
Références : Réseau juridique du Québec, CNESST, CCHST